Passage de Vénus devant le Soleil

  8 juin 2004

 

Depuis l’hiver dernier, il est possible d’observer un astre lumineux dans le ciel juste après le coucher du soleil. Ce point, l’objet le plus brillant de notre ciel (après le Soleil et la Lune bien sûr) est la planète Vénus.

Le 8 Juin prochain, cette planète va passer devant le Soleil et il est possible d’exploiter avec nos élèves cet événement. En effet les implications historiques et scientifiques du transit de Vénus sont importantes et c’est donc l’occasion de regrouper plusieurs disciplines autour d’un thème commun.

 

 

Vénus en quelques mots !

 

Après Mercure et avant la Terre, Vénus est la deuxième planète du système solaire. De taille assez proche de celle de notre planète, Vénus a souvent été décrite comme la jumelle de la Terre. Pourtant les conditions à sa surface sont très différentes de celles que nous connaissons sur Terre. La pression de l’atmosphère y est environ 100 fois plus importante et la température moyenne de 450 °C.

Imaginez-vous  sous 1000 mètres d’eau à la température de fusion du plomb !

 

 

 

 

 

Le transit de Vénus devant le Soleil est un phénomène très rare !

 

La dernière fois que Vénus a été observée devant le Soleil remonte à l’hiver 1882. Les passages suivants se passeront en juin 2012 puis en décembre 2117 (!). Le transit de Vénus devant le Soleil s’effectue donc selon un cycle assez complexe de 121,5 ans, 8 ans, 105,5 ans, 8 ans et le cycle recommence. Ainsi, il ne reste aucun observateur du dernier transit, celui de 2012 ne sera pas observable en France et oublions celui de 2117.

Nous avons donc une chance d’observer un événement astronomique que peu de personnes ont eu l’occasion d’admirer.

 

 

 

 

Ce phénomène a une place importante dans l’histoire des sciences !

 

Connaître le Monde dans lequel vit l’humanité passe par la mesure de la taille de ce Monde. La description de notre univers, d’abord basée sur des récits mythologiques, s’est petit à petit construite à partir d’observations ou d’expériences permettant d’en mesurer la grandeur.

     G. Frisius

Tout d’abord, les premières expéditions aussi bien terrestres que maritimes permettent d’affirmer que la Terre est vaste. Au IIIème siècle avant notre ère, les Grecs savent déjà que la Terre est ronde et Eratosthène détermine la mesure de son rayon. Ces mesures vont se prolonger jusqu’au XVIIIème siècle avec notamment l’utilisation de la triangulation (G. Frisius) à partir du XVIème siècle. Plus de deux mille ans, cela représente beaucoup de temps ! Certes, mais la tâche est difficile : la Terre n’est pas une sphère parfaite, la connaissance exacte de la longitude en mer ne sera réellement possible qu’avec l’invention des chronomètres de marine (Harrison XVIIIème siècle) et les différentes expéditions entreprises sont soumises au difficultés dues à une navigation parfois hasardeuse et aux relations houleuses entre les différents états traversés.

 

Mais si la Terre finit par être arpentée, qu’en est-il du système solaire ?

 

Kepler (1571-1630) sûr que le modèle de Nicolas Copernic (héliocentrisme) est le bon, affirme que toutes les planètes sont liées par leurs distances au Soleil et par leurs périodes de révolution autour de celui-ci. Cette loi trouvée de manière empirique est fondamentale dans l’histoire de l’astronomie. En effet, puisque les périodes sont connues, les distances entre les planètes et le Soleil peuvent être exprimées par rapport à la distance entre la Terre et le Soleil. Il faut donc connaître avec suffisamment de précision cette distance, d’ailleurs appelée unité astronomique, pour pouvoir connaître toutes les distances dans le système solaire ! C’est là qu’intervient l’utilisation du transit de Vénus.

  

Prévues par Kepler, les passages de Vénus devant le Soleil seront observés en 1639 par Horrocks et Crabtree, c’est l’éclatante confirmation de la validité de ces travaux. Isaac Newton retrouvera d’ailleurs de manière théorique les travaux de Kepler.

  

 Les passages suivants (1761 et 1769) sont bien préparés sur les conseils d’E. Halley (1646-1742) qui savait qu’il ne vivrait pas assez

Série de timbres poste en l’honneur de l’observation du passage de Vénus faite par Cook à Tahiti.

longtemps pour les observer. Et c’est ainsi qu’en pleine guerre de 7 ans, plusieurs expéditions scientifiques pour la plupart françaises sillonnent les mers. De nombreux récits très documentés de ces observations sont réalisés mais les résultats scientifiques sont très moyens et la marge d’erreur encore trop importante. En 1769, les rôles s’inversent, l’Angleterre, dominatrice sur les mers depuis la fin de la guerre, envoie les plus grandes expéditions dont celle commandée par James Cook.

En ce qui concerne les Français, il faut noter l’histoire de Le Gentil : parti en 1758 de France pour observer le phénomène en Inde. Il rate le transit de 1761 à cause de la guerre. Il décide alors de rester sur place pour le transit suivant mais comble de malchance, il le rate à nouveau à cause du mauvais temps. Il ne rentre en France que plus de onze ans après être parti !

Malgré, un meilleur matériel les résultats restent décevants : la mesure de la durée du passage est encore trop peu précise. Même si la marge d’erreur est plus faible qu’en 1761, cela n’est pas encore satisfaisant.

 

A la fin du XIXème siècle, la valeur précise de la distance Terre-Soleil manque terriblement aux astronomes. A cette époque, ils commencent à calculer les distances des différentes étoiles. Ces calculs ne peuvent s’effectuer qu’à l’aide de la valeur étalon qu’est la distance Terre-Soleil. Ainsi, en 1874 et 1882, de nombreuses expéditions partent observer le transit avec de nouveaux outils tel l’appareil photographique. Les passages de Vénus, ces années-là, ont un retentissement populaire très important. Des astronomes amateurs participent aux observations et le public, à l’aide des journaux, ont des nouvelles régulières des différentes expéditions. Les résultats sont à la mesure de l’engagement mondial : très importants. Désormais la distance Terre-Soleil est connue avec une précision plus grande.

Peu après, la communauté scientifique estime que pour améliorer la mesure il faudra attendre les prochains transits. C’est ainsi que Camille Flammarion écrit dans la revue ‘L’astronomie’ en 1882 : « Le prochain passage n’aura lieu qu’au vingt et unième siècle, dans cent vingt et un an et six mois : le 8 juin 2004, de 5 h à 11 h du matin. Les meilleurs points d’observation sont déjà choisis (comme ceux de 1874 et 1882 l’étaient dés 1769) ; mais les astronomes qui doivent s’y rendre ne sont pas encore …connus. »

 

Heureusement aujourd’hui le moyen de connaître la valeur de l’unité astronomique est différent : on utilise le radar ce qui donne une précision importante sans avoir à attendre que Vénus passe devant le Soleil !

 

Comment observer le passage du 8 juin ?

 

Tout d’abord il faut absolument insister sur les mesures de sécurité nécessaires pour observer le Soleil. Il faut interdire l’observation directe qui peut entraîner une destruction irréversible de la rétine. Le seul moyen de se protéger reste les lunettes spéciales pour observer les éclipses. Constituées de Mylar, elles sont en vente dans les magasins spécialisés (voir annexe). On peut simplement espérer que quelques revues scientifiques en fournissent à la livraison de leur numéro du mois de juin !

Il faut cependant avoir à l’esprit que le phénomène sera peu visible de cette façon : le diamètre apparent de Vénus est, en effet, environ 30 fois plus petit que celui du Soleil. Il est donc préférable d’utiliser une lunette ou un télescope pour cet événement.

Pour l’observation à l’aide d’un instrument astronomique, les protections doivent être aussi importantes : il faut insérer un filtre afin de ne transmettre qu’une toute petite partie de la lumière reçue effectivement. De plus, il faut penser à occulter totalement le chercheur de l’appareil qui pourrait être totalement détruit par les rayons solaires.

Enfin on peut aussi procéder par projection de l’image du Soleil à l’aide d’une lunette astronomique ou d’un télescope sur un écran. C’est ce système par projection qui est utilisé par le Solarscope, instrument inventé par J. Gay de l’observatoire de la Côte d’Azur.

 

Il faut donc faire très attention avant chaque observation et surtout ne pas hésiter à demander conseil.

 

 

 

Que va-t-il se passer au lycée Branly le 8 juin 2004?

 

Ainsi le 8 juin 2004 entre 7h00 et 13h30, nous allons pouvoir observer ce phénomène dans la cour du lycée. Notre ‘observatoire’ comportera quelques instruments.

Le laboratoire de Sciences Physiques a fait l’acquisition d’un Solarscope qui permet l’observation du Soleil par plusieurs personnes en toute sécurité. Depuis quelques mois donc, plusieurs classes ont déjà pu observer le Soleil et y admirer quelques taches. Le 8 juin, Vénus aura un diamètre de 3,5 millimètres sur l’écran du Solarscope ce qui suffisant pour observer tout le transit.

Nous avons aussi à notre disposition une lunette astronomique, qui pourra aussi par projection nous donner une image intéressante.

 

 

Enfin une classe de seconde (2nde C), dans les semaines qui viennent, va devoir dans le cadre de travaux pratiques de sciences physiques, imaginer un système pour enregistrer le transit à l’aide d’une webcam. La mise au point du système et l’analyse des résultats se fera en classe.

Il sera de cette façon possible de réinvestir l’année scolaire prochaine les enregistrements avec d’autres élèves.

 

 

 

 

 

Quelques mots d’Edmond Halley pour finir : « (…) je souhaite sincèrement (aux astronomes curieux) tout le succès imaginable ; d’abord qu’ils ne soient pas, par l’obscurité intempestive d’un ciel nuageux, privés de cette vue tant espérée ; et qu’ils acquièrent une renommée et une gloire éternelles pour avoir établi avec la plus grande précision les ampleurs des orbites planétaires. »

 

  

 

Bilan du passage

 

 

                                                    

 

 

 

                                                                Annexe

 

Heures de passage de Vénus à Paris (en Temps Universel):

 

Premier contact

Deuxième contact

Troisième contact

Quatrième contact

Paris (08/06/2004)

05h19’ 57’’.4

05h39’ 49’’.0

11h04’12’’.4

11h23’40’’.7

Pour connaître l’heure légale, il faut ajouter 2 heures à l’heure indiquée.

 

Internet :

http://www.imcce.fr/vt2004/                L’essentiel de ce qu’il faut savoir sur cet événement.

http://gallica.bnf.fr/                                 Beaucoup de textes historiques mis en ligne.

 

 

Quelques livres et revue traitant de ce sujet… :

Vénus devant le Soleil sous la coordination d’A. Simaan (Vuibert/Adapt).

La science au péril de sa vie d’A. Simaan (Vuibert/Adapt).

Une histoire de l’astronomie de J.P. Verdet (Point Sciences).

Le rendez-vous de Vénus, roman de J.P. Luminet (Le Livre de Poche).

Astronomie magazine.

Ciel et Espace.

L’astronomie (disponible au C.D.I).

 

                                                                                    …et plus généralement.

Les planètes de D. Benest (Point Sciences).

Les grandes expériences scientifiques de M. Rival (Point Sciences).

Histoire mondiale des sciences de C. Ronan (Point Sciences).

Penser l’Univers de J.P. Verdet (Découvertes Gallimard).

 

 

Pour acheter des lunettes ou du matériel :

-         La maison de l’astronomie 33 rue de Rivoli 75004 Paris

-         Certains opticiens vendent du matériel d’observation.

-         Ne pas hésiter à demander conseil !